Santé

La Sécu spoliée

Au début de l’été, un rapport « resté discret » sur « la rénovation des relations financières entre l’État et la Sécurité sociale » a été remis au gouvernement. Il propose notamment une règle de « solidarité » entre l’État et la Sécurité sociale. Ainsi, au 1er janvier 2019, le Crédit d’Impôt Compétitivité Emploi – le CICE, chèque en blanc aux entreprises, de l’ordre de 20 Mds € par an – sera « transformé » en allègement de cotisations patronales. Cela induira une perte sèche pour la Sécurité sociale alors que ses comptes se redressent. La loi prévoit qu’au-dessus du seuil de 0,8 point de PIB, l’excédent sera écrêté au profit de l’État : 3 Mds en 2019, 14 en 2020, 20 en 2021, et plus de 27 en 2022.
FO dénonce depuis des années la confiscation des recettes de la Sécu par l’État que ce soit pour son propre désendettement, sa politique économique ou pour renflouer les entreprises. L’affaiblissement de la Sécu induit le développement des assurances privées aux dépens des droits collectifs. Concrètement, les ponctions réalisées sur les finances de la Sécu conduisent à l’amputation des prestations, des remboursements, du budget des hôpitaux, de l’autonomie, des pensions de retraites, des indemnités pour maladies… FO rejette toute atteinte à notre système de protection sociale. Une raison supplémentaire de nous mobiliser le 9 octobre.

Pronostic vital engagé pour la santé au travail

Le rapport sur la santé au travail commandé par le gouvernement en janvier dernier et confié à la députée Charlotte Lecocq, a été rendu public le 28 août. La principale proposition de ce rapport consiste à réunir en une seule et même instance nationale nommée « France santé travail » (une sorte de « guichet unique ») les différents acteurs concourant à la prévention de la santé au travail :  les services de santé au travail interentreprises – qui emploient notamment les médecins du travail –, les agents des Carsat (caisses d’assurance retraite et de la santé au travail), bras armé de la branche accident du travail et maladie professionnelle de la Sécurité sociale, les salariés de l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) et ses déclinaisons régionales (Aract), l’Organisme de prévention dans la branche du bâtiment, l’OPPBTP… Tous ces organismes ayant la particularité d’être, historiquement, gouvernés de manière paritaire, c’est-à-dire à la fois par des syndicats de salariés et le patronat, la mise en place d’une gouvernance tripartite de cette instance (c’est-à-dire avec un conseil d’administration composé de représentants de l’État, des employeurs et des salariés) non seulement éloignerait de fait les représentants des salariés mais aussi renforcerait le pouvoir de l’État qui, parce que lui-même employeur, serait donc à la fois juge et partie….
Si la « simplification » à l’extrême du système apparaît clairement dans ce rapport, en revanche le renforcement attendu de la prévention y est totalement absent. Ce qui compte désormais, ce n’est plus de faire de la prévention médicale primaire au bénéfice des salariés, mais c’est de venir en appui de l’employeur. Le médecin du travail devient à la fois l’agent d’une médecine de sélection en délivrant des certificats d’aptitude  et l’accompagnateur du chef d’entreprise, sous couvert de prévention. C’est pourquoi il y a lieu de s’inquiéter tout particulièrement  de  la recommandation visant la suppression de la fiche d’entreprise, l’un des outils de traçage, par le médecin du travail, des risques professionnels au plus près des salariés, ainsi que du document unique remplacé par un « plan de prévention » établi par les employeurs avec l’ appui et le soutien de structures régionales privées ! Enfin, les auteurs du rapport  recommandent également de ne plus soumettre les employeurs à  « l’obligation de sécurité de résultat » en matière de santé au travail, mais à une « obligation de moyens » car, selon eux, l’obligation de sécurité de résultat, poussée à l’extrême, décourage la prévention !!!  Pour Force Ouvrière, ce projet est cohérent avec la disparition des CHSCT, les ordonnances de la loi travail et la remise en cause de certains critères de pénibilité.  Les regroupements et simplifications qu’il propose visent non pas à renforcer la prévention mais à faire des économies et à déresponsabiliser les chefs d’entreprises.

Mais d’où vient la hausse des dépenses d’indemnités journalières ?

Depuis 2014, le montant des indemnités journalières est en hausse. Après avoir progressé de 3,7% en 2015 et de 4,6% en 2016, en 2017, ces dépenses ont augmenté de 4,4% pour atteindre 10,3 milliards d’euros. La tendance est même à l’accélération de cette hausse. Depuis le début de l’année, les indemnités journalières ont augmenté de 5,7%, selon le dernier communiqué des dépenses de l’Assurance maladie. Pour le mois de mai, cela représentait une dépense de 904 millions d’euros.
Contrairement à ce que dit le gouvernement cette augmentation ne vient pas d’une subite montée de l’irresponsabilité des salariés qui abuseraient d’un système « illisible et déresponsabilisant » ce qui « encourage l’arrêt de travail de complaisance, l’absence répétée du vendredi ou le congé maladie ». La raison est à chercher dans le recul de l’âge de départ à la retraite et la dégradation des conditions de travail. Il faut arrêter de stigmatiser malades et médecins pour justifier le pillage de notre Sécu.

Arrêts maladie : le gouvernement veut désengager la Sécu

Le gouvernement envisage de basculer (pour commencer) quatre jours d’indemnisation de la Sécurité sociale vers les employeurs pour les arrêts de moins de huit jours. Un transfert de charge de 900 millions contesté par le patronat comme par les syndicats. FO juge ainsi inadmissible ce désengagement de l’Assurance-maladie dont le but est de contribuer aux 30 milliards d’économie que la programmation pluri-annuelle des finances publiques exige de la Sécurité sociale d’ici à 2022.
L’objectif est, in fine, de faire main-basse sur la Sécu. Le gouvernement a déjà supprimé en 2018 la cotisation maladie, qui signifiait que tous les salariés, solidaires, cotisaient pour le paiement de leurs Indemnités Journalières. Cette suppression a été compensée par une hausse de la CSG : les salariés paient toujours pour leurs IJ mais désormais de manière « fiscale » et non « sociale ». L’État peut ainsi se prétendre propriétaire des recettes de la Sécurité sociale et en faire ce qu’il veut, y compris diminuer les droits des assurés pour financer sa politique !

Sécu redressée sécu pressurisée

L’Assurance-maladie devrait frôler l’équilibre financier en 2018, selon la Commission des comptes de la Sécurité sociale. Son déficit serait ramené à un niveau proche de celui de l’année 1999 : 500 millions d’euros contre un déficit constaté de 4,9 milliards en 2017. Et les quatre branches du régime général additionnées au Fonds de solidarité vieillesse frôlent également l’équilibre.
Si l’on peut se féliciter du redressement des comptes de la sécu, encore faut-il se rappeler à quel prix on y est parvenu : système de soins dégradé, hôpitaux  et Ehpad dans une situation catastrophique, déremboursements massifs… Et le comble est qu’on va maintenant transférer les probables excédents à venir de la Sécurité sociale vers l’État. Cela est prévu sur la durée du quinquennat, et d’ores et déjà inscrit dans la Loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022.
Pour FO, au lieu de multiplier ces pratiques destructrices de notre modèle social, il faudrait, pour commencer, retrouver les dizaines de milliards d’euros de recette perdues chaque année en raison du travail dissimulé, de l’évasion socio-fiscale…